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Article | Janvier 2002 : Linux, l'électron libre qui inquiète Microsoft |
Sujet | Linux |
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Liens | http://linuxfr.org/2001/12/26/6473%2C0%2C1%2C0%2C0.html |
Le Monde daté du 26 décembre consacre une page entière à Linux + une annonce en couverture. Le dossier est composé de 3 articles signés de Stéphane Foucart.
Les titres :
-Linux, l'électron libre qui inquiète Microsoft
-Les géants du secteur s'adaptent
-Le logiciel gratuit face au verrou du brevet
Le dossier est globalement assez exact, à part une bourde dans
l'introduction ("né au début des années 1980, Linux...").
Sont cités :
-l'adoption par les universités,
-le support d'IBM, Sun, Oracle, HP, Compaq, Dell, Cap Gemini
-Stallman et la GPL
-la communauté des développeurs, estimée à 300 000 membres
-Bob Young, Red Hat, Mandrake,
-les distributions
-la qualité des développements et la sécurité
-Bernard Lang et l'AFUL sur les brevets (bombe à retardement)
-la prise anticipée de brevets par l'OEB
-Ezratty (Microsoft) qui admet qu'il y a des abus dans les dépôts de
brevets
-Le Marois (Mandrakesoft) et Noël Mamère
Conclusion de B.Lang : Linux, c'est l'indépendance technologique de
l'Europe
Linux, l'électron libre qui inquiète Microsoft
Le système d'exploitation gratuit créé dans les années 1980 était
jusqu'à présent surtout utilisé par les administrations et les universités. Mais il
commence à séduire les entreprises. Plus qu'un concurrent, c'est un modèle culturel
opposé au sien que craint la firme de Bill Gates. "Linux est un concurrent sérieux
pour Microsoft. La question qui se pose à nous est de savoir comment apporter de la
valeur face à ce phénomène." Venant de Steve Ballmer, PDG de Microsoft, le propos,
lancé à la fin du mois d'octobre, est inattendu. Plus qu'à un système d'exploitation
concurrent ? il en existe d'autres ?, c'est à une culture et à un modèle économique à
l'exact opposé des siens qu'est confronté l'éditeur dirigé par Steve Ballmer et Bill
Gates.
Microsoft développe ses logiciels en grand secret et à coups de
milliards de dollars ; Linux et tous les logiciels baptisés "libres" sont
élaborés dans la transparence par des communautés de développeurs bénévoles. Le
code-source ? la "recette" ? des logiciels Microsoft est jalousement gardé ;
celui des logiciels libres est publié sur Internet et modulable à l'envi. Surtout,
Microsoft tire l'essentiel de ses revenus des licences d'utilisation, alors que dans le
monde de Linux et de l'informatique libre, l'utilisation des logiciels est en principe
gratuite, seuls les services afférents étant commercialisés. Très peu présent dans
l'informatique grand public, le logiciel libre intéresse en revanche de plus en plus les
gouvernements et les entreprises. Selon le Club informatique des grandes entreprises
françaises (Cigref), le mouvement, vraiment perceptible depuis deux ans, prend
aujourd'hui de l'ampleur. Le cabinet d'études IDC le confirme : en 2000, plus de 27 % des
serveurs vendus dans le monde fonctionnent sous Linux, contre un peu plus de 40 % sous
Windows.
Né au début des années 1980 dans les milieux de l'enseignement et de
la recherche américains, le logiciel libre relève avant tout du mouvement militant.
Fondé sur les valeurs de partage et de diffusion des connaissances, notamment techniques,
il a fortement bénéficié de l'émergence d'Internet. Sur la Toile, des communautés de
développeurs structurées se sont progressivement constituées, qui créent et
améliorent des logiciels, pour le simple plaisir du travail collectif et de la prouesse
technique, à l'image du Finlandais Linus Torvalds, le créateur de Linux. Ces
informaticiens (professionnels ou amateurs) sont généralement estimés à près de 300
000 personnes dans le monde. Le nombre de projets de logiciels, aboutis ou non, est de
l'ordre de 30 000. Parmi ces produits, l'internaute trouve non seulement le système
d'exploitation Linux, mais aussi des suites bureautiques, des logiciels anti-pirates ou
encore des programmes très spécialisés.
Libre, l'utilisation de ces programmes n'en est pas moins encadrée.
Elle est généralement soumise à la General Public License (GPL), écrite par Richard
Stallman, ancien chercheur au MIT et père spirituel de l'informatique libre. La GPL
garantit la liberté d'utilisation, de copie, de diffusion et de modification de ces
logiciels. A condition toutefois que les modifications apportées soient soumises au même
régime.
Si, aujourd'hui, le logiciel "libre" sort des universités et
des centres de recherche pour toucher les entreprises et les administrations, c'est, selon
Bob Young, PDG de RedHat, le principal éditeur de solutions Linux, parce que "les
entreprises veulent reprendre le contrôle de leur système informatique" face aux
grands éditeurs.
Avec cette vague du "libre", l'industrie du logiciel voit de
nouveaux acteurs émerger. Les éditeurs du monde Linux, comme MandrakeSoft ou RedHat
(respectivement cotés sur le marché libre et au Nasdaq), collectent des suites
logicielles qu'ils agrègent autour du système d'exploitation libre. Ces solutions
prêtes à l'emploi ? appelées "distributions Linux" ? sont commercialisées,
tout en laissant libres les utilisateurs de procéder à une copie et une diffusion des
produits. La survie, pour ces éditeurs, ne passe pas par la commercialisation de
licences, mais par celle des services liés à l'utilisation de ces logiciels. Mises à
jour, support technique, conseil et formation, forment pour eux l'essentiel des revenus.
La viabilité d'une telle économie n'est pas évidente. "Linux souffre d'un modèle
qui oblige à vivre sur les services, analyse Alain Pétrissans, directeur du pôle
logiciel à IDC France et auteur d'un rapport sur le modèle économique du logiciel
libre, commandé par le secrétariat d'Etat à l'industrie et à paraître début janvier.
Or, les marges sont générées au coup par coup en fonction des projets des clients. De
plus, les sociétés de service spécialistes de Linux se retrouvent en concurrence avec
les géants du service."
Pour Frédéric Lau, chargé d'étude au Cigref, "le prix des
licences n'est pas en soi un facteur déterminant de migration vers Linux. C'est plus la
qualité des développements et de la sécurité, et la stabilité de Linux, qui suscitent
l'intérêt. Par exemple, lors de la découverte d'une faille de sécurité, le programme
correctif est disponible très rapidement après avoir été soumis à l'approbation de la
communauté des développeurs, ce qui est un gage de transparence et de qualité".
Le système a cependant les défauts de ses vertus. Certes la
communauté de développement d'un logiciel libre n'y apportera de modifications qu'en cas
de nécessité technique, et non pas pour gonfler le compte d'exploitation d'un éditeur
mais la pérennité de ces communautés, fondées sur le volontariat, n'est pas garantie.
Ce point, selon M. Lau, pourrait dissuader les entreprises de choisir des solutions
libres. Pour répondre à cette possible volatilité, RedHat ou MandrakeSoft, mais aussi
des jeunes sociétés de services liées à l'informatique libre font ?uvre de
"mécénat" en salariant certains membres de ces communautés. Mais c'est
surtout l'arrivée des grands du service informatique (Cap Gemini, IBM) sur ce marché qui
permettra vraiment au secteur du logiciel libre de décoller.
Stéphane Foucart
ARTICLE PARU DANS L'EDITION DU 26.12.01
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